« La datte medjoul est née au Maroc et non en Palestine occupée »
Si Israël, la Californie et la Jordanie sont les principaux producteurs et exportateurs dans le monde de dattes medjoul (ou medjhoul), cette variété a pour origine le Maroc. Importateur en France, Atmane Idrissi, dont la famille cultive la medjoul à Boudnib, dans la région de Drâa-Tafilalet, nous en dit plus.
Al-Kanz : Originellement, la variété de dattes « medjoul » vient du Maroc et non de la Palestine occupée, n’est-ce pas ?
Atmane Idrissi : Précisons tout d’abord que le mot « medjhoul » en arabe signifie « inconnu », « anonyme ». Ce qui est plutôt cocasse pour cette datte aujourd’hui mondialement connue et reconnue.
La variété de dattes medjoul a en effet pour origine le sud du Maroc, plus précisément la ville saharienne de Boudnib dans la région de Drâa-Tafilalet ou, à une centaine de kilomètres de là, la ville d’Aoufous. Il y a divergence sur le sujet.
Elle doit sa notoriété aux commerçants de la région de Tafilfalt grâce à qui, depuis le désert, elle rejoignit les côtes marocaines puis l’Europe.
Marocaine pendant des siècles, elle fut exportée au début du XXe siècle en Californie, puis en Palestine. On en trouve actuellement dans de nombreux pays où la culture de la datte est implantée, comme au Pakistan ou même en Thaïlande.
Al-Kanz : Comment expliquer que cet héritage marocain se soit perdu au profit de la medjoul israélienne ?
Atmane Idrissi : Ce n’est pas le seul héritage qui a échappé aux Marocains. Citons rapidement la cuisine ou la maroquinerie.
Le Maroc a été un grand carrefour commercial au rôle clé dans les échanges entre l’Afrique, le Moyen-Orient et l’Europe. Ses innombrables oasis, par exemple, faisaient office de flux caravaniers.
Mais à partir de la conquête des Amériques, les Européens réduisent leur dépendance à l’or africain qui transite par le Maroc en s’accaparant celui du Nouveau Monde. Ces nouvelles routes commerciales changent la donne. Si le Royaume conserve un rôle important, les Etats européens privilégient l’Atlantique.
Les oasis du Sud après avoir connu leur temps de gloire sont abandonnées. Les palmeraies, plus entretenues, subissent des vagues d’épidemies de bayoud, un champignon qui s’attaque au système vasculaire du palmier et qui empêche l’acheminement de l’eau et des nutriments.
La sechèresse sans précédent qui frappe l’Afrique en 1973 tarit les quatre grands lacs du Mali ainsi que les oasis du Maroc. Frappées de plein fouet, les palmeraies voient leur productivité s’effondrer et leur écosystème mis en péril.