Libération de Clotilde Reiss: Les dessous d'une négociation
IRAN - Au lendemain de la remise en liberté de la jeune universitaire, sous caution versée «autour de 200.000 euros» selon Kouchner, tour d'horizon des questions qui se posent...
La France a-t-elle versé une caution ou une rançon?
La France aurait versé 210.000 euros pour la liberté conditionnelle de Clotilde Reiss, la lectrice de français détenue en Iran depuis le 1er juillet. Un chiffre que Bernard Kouchner, le ministre des Affaires étrangères a tenu à préciser sur LCI, estimant que le montant de la caution était «autour de 200.000 euros». Le procureur de Téhéran Saïd Mortazavi, cité par l'agence Mehr, a quant à lui indiqué que «Clotilde Reiss a été libérée après le dépôt d'une caution de 300 millions de tomans», soit environ 213.000 euros (300.000 dollars). Il s’agit bien d’une caution, et non d’une rançon qui, par définition, n’est pas récupérable puisqu’elle sert de monnaie d’échange à la libération d’un otage. En Iran, l’argent d’une caution est récupérable si la personne retourne en prison. En revanche, elle peut être encaissée par les autorités iraniennes en cas de faute grave durant la liberté conditionnelle. A titre de comparaison, un otage suisse a été libéré au Mali le 12 juillet moyennant, lui, une rançon d’environ 5 millions d’euros.
Le prix de la caution est-il élevé?
En Iran, toute liberté conditionnelle requiert le versement d’une caution. Cela peut être de l’argent liquide ou bien un titre de propriété d’un bien immobilier voire automobile. Toutefois, le montant de cette caution de Clotilde Reiss paraît élevé par rapport à ce qu’ont versé des manifestants de Téhéran, également emprisonnés. «Tout dépend de l’accusation et de l’importance que représente le prisonnier», a déclaré Abolhassan Bani Sadr, le premier président de la République islamique joint par 20minutes.fr. Selon lui, les manifestants ont, eux, dû verser entre 14.000 et 36.000 euros en fonction du crime commis.
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Quel rôle a joué Nicolas Sarkozy dans la négociation?
Pendant ses vacances au Cap Nègre, le Président français n’a pas cessé d’œuvrer pour cette remise en liberté. Le 9 août déjà, il avait déclaré que la libération de Clotilde Reiss était son «objectif prioritaire» et qu’il multipliait les «interventions auprès de tous ceux qui peuvent exercer une influence» en vue de celle-ci. L’Elysée, qui a annoncé la libération de la jeune Française, a précisé que le chef de l’Etat s’était entretenu avec elle à sa sortie de prison. Ce lundi, Luc Chatel, le porte-parole du gouvernement, assure que Nicolas Sarkozy «continue de se mobiliser» pour obtenir une libération définitive «dans les plus brefs délais».
Que va-t-il se passer pour Clotilde Reiss désormais?
La jeune universitaire a quitté la prison d’Evin, mais elle n’a pas quitté l’Iran. Selon les conditions de sa libération sous caution, elle doit rester à l’ambassade de France à Téhéran en attendant son jugement par le tribunal révolutionnaire. Elle reste donc sous le contrôle judiciaire des autorités iraniennes. Quand sera-t-elle jugée? «Théoriquement (...) sous les huit jours», a annoncé Bernard Kouchner sur France Info, avant de préciser: «On ne peut pas garantir que ce soit seulement huit jours, je n'en sais rien.» En attendant, l’ambassade de France à Téhéran lui apportera «tout le soutien nécessaire, pour lui permettre de préparer sa défense et faire reconnaître son innocence», a ajouté le chef de la diplomatie française.
Quel a été le rôle de la Syrie?
Comme dans le cas de la libération de Nazak Afshar, Paris a demandé l’aide de pays pouvant avoir une «influence» sur la scène politique iranienne et plus particulièrement, la Syrie. Luc Chatel a reconnu ce lundi que le rôle de Damas avait été très important, sans détailler davantage. A la demande expresse de Nicolas Sarkozy, Bashar al-Assad a profité de son statut d’allié de Téhéran pour œuvrer à la libération sous condition de la jeune universitaire. Pour rappel, Nicolas Sarkozy avait invité, l’an dernier au défilé du 14 juillet, al-Assad, une invitation qui avait permis à la Syrie de revenir sur le devant de la scène internationale. Au final, la libération sous caution de Clotilde Reiss permet à Damas de consacrer son image de médiateur potentiel entre l’Occident et l’Iran, notamment sur l’épineuse question du nucléaire.
Paul Najafi et Elodie Lestrade