Gustave LeBon,a étudié de très près les peuples arabes et indiens (avec une certaine approche raciste d'ailleurs).
Il est vraiment étonnant qu'un homme aussi ethnocentriste que lui reconnaisse que l'arabe a éduqué l'homme occidental au point où toutes les universités occidentales étaient submergées par la littérature arabe.
Nas E.Boutammina a parfaitement montré que plusieurs auteurs prétendument grecs n'ont jamais existé : Archimède, par exemple. Son existence relève de l'utopie et c'était une sacré falsification (pour ne pas dire supercherie) pour pouvoir attribuer la découverte de la fameuse "poussée d'Archimède" aux Grecs alors qu'en réalité on devrait entendre par Archi-Mède -> Ach-Cheikh Ahmad ...
Je recommande aussi l'ouvrage de Nas E.Boutammina, "les contes des milles et uns mythes" pour ce genre de détails concernant la falsification des découvertes scientifiques.
http://www.entretemps.asso.fr/arabe/Boutammina.htm
« [1]
J’ai lu votre livre « [2] pour m’instruire sur les trois grands savants Al-Khwârizmî, Al-Qalsadî et Al-Kâshî dont les noms sous-titrent votre ouvrage.
J’y ai en effet appris sur leur inventivité en matière respectivement d’algèbre, de numération et d’arithmétique – ce dont je vous sais gré – mais j’ai été étonné (quoique le titre même de votre ouvrage l’indiquait) de voir que, concomitamment, vous éprouviez le besoin de thématiser ces développements créateurs comme pure et simple « création » des mathématiques dans leur ensemble. Je vous cite (en soulignant les mots les plus importants) :
— « apparues avec la révélation de l’Islâm [3]
— « crée et développe les mathématiques – dont l’algèbre est la base [4]
— « Grèce, Rome…) qui d’une part n’existaient pas et qui d’autre part ne pouvaient pas exister[5]
— « la tradition […] grecque qui demeure rectiligne et uniforme, c’est-à-dire fondée sur les dieux et leurs mythes[6]
— « fondateurs des sciences [7]
— « [8]
— « mythologique[9]
— « crée les mathématiques. […] Il est le père fondateur des mathématiques[10]
— « met en place la structure axiomatique des systèmes déductifs [11]
Sur cette lancée, vous présentez les grands mathématiciens - Thalès, Euclide, Pythagore et Archimède - qui les ont précédés comme des « » [12] et vous classifiez ceux qui les ont suivis comme « [13], soit
· Fermat et Gauss, pour ce qui concerne Al-Khwârizmî [14],
· Viète et Descartes, pour ce qui concerne Al-Qalsadî [15],
· Cardan et Euler, pour ce qui concerne Al-Kâshî [16].
Tous ces points constituent des contre-vérités patentes et je ne vois guère l’intérêt d’y recourir pour défendre, tout à fait légitimement, la mémoire glorieuse des trois savants dont il est question dans votre livre.
Je tiens qu’il n’est guère besoin d’abaisser leurs prédécesseurs pas plus que de présenter leurs successeurs comme des imposteurs pour relever la grandeur d’Al-Khwârizmî, d’Al-Qalsadî et d’Al-Kâshî. Je tiens qu’il n’est aucunement besoin de minorer la géométrie pour exhausser l’algèbre. Je tiens qu’il est contre-productif, pour mieux défendre l’apport mathématique d’Al-Khwârizmî, de le représenter comme créateur non de l’algèbre mais de toute la mathématique. Et je crains fort que, ce faisant, vous ne tombiez dans le travers dénoncé jadis par Al-Ghazâlî et, qu’en croyant défendre l’Islam par un rejet des mathématiques grecques dans un obscurantisme de la
J’ai parlé de contre-vérités. Le lieu n’est pas de développer tous ces points. Six indications cependant sur la manière dont les inventions de Bagdad peuvent s’articuler sur celles de l’ancienne Grèce.
1. Les mathématiques grecques se distinguent radicalement des mathématiques antérieures (babyloniennes, égyptiennes, etc.) sur un point décisif [17] : elles ont inventé de soumettre les énoncés mathématiques à la discipline d’une démonstration. Avant cette décision et la nouvelle orientation qui en a procédé, la mathématique était le lieu du simple calcul et des innombrables algorithmes dont le critère de validité n’était alors que l’efficacité. À partir des Grecs, la mathématique est devenue le lieu du raisonnement déductif et les énoncés mathématiques ont été différenciés en théorèmes (énoncés démontrés), énoncés faux et énoncés décidés ou principiels (axiomes [18]). Cette invention – l’énoncé mathématique doit être désormais prouvé (ce qu’Al-Ghazâlî rappelle d’ailleurs en écrivant que « [19]) - peut être vue comme la véritable invention des mathématiques si l’on met bien au cœur de cette science moins le seul calcul que la charge de la démonstration.
2. Cette invention de la démonstration s’est faite par une coupure radicale dans l’histoire de la rationalité humaine : celle de confier la raison aux conséquences du raisonnement par l’absurde. Le premier à avoir ainsi déployé la raison sous la discipline de telles conséquences est le philosophe Parménide en introduisant, au cœur même de son
3. Cette confiance mise par la nouvelle mathématique en la discipline implacable de la raison et, plus courageusement encore, en les conséquences logiques de la double négation [20] va conduire ces mêmes Grecs à démontrer que
4. Cette question arithmétique (la quantité
5. Il est vrai que ces mathématiques grecques se sont ensuite éteintes sous l’empire Romain : Rome n’a pas eu une mathématique créatrice comme la Grèce en avait eue (et, de ce point de vue comme de bien d’autres, il n’est guère pertinent de confondre Athènes et Rome en un grand ensemble pré-islamique [21]). Il est ensuite bien vrai qu’il a fallu, bien plus tard, les arabo-persans (musulmans mais également chrétiens et juifs… [22]) pour ressusciter cette mathématique (comme d’ailleurs la philosophie pour laquelle on constate un même désintérêt de Rome) en y créant en particulier cette nouvelle discipline mathématique centrale : l’algèbre.
6. À partir de là, le dispositif « moderne » de la mathématique peut être vu comme l’articulation de ces trois grandes composantes : géométrie, arithmétique et algèbre ; et il n’est que de mesurer, depuis les années 1960 (Alexandre Grothendieck…), l’importance décisive de la géométrie algébrique dans les mathématiques les plus contemporaines et les plus créatrices pour prendre acte des effets à très longue portée de l’algèbre inventée à Bagdad à partir du IX° siècle.
Quel besoin donc de nier tout ceci – qui constitue des faits historiques, aisément vérifiables par toute personne instruite et de bonne foi – pour servir votre cause légitime ? Pourquoi adopter la même grille de lecture que vos ennemis (l’absurde : « ») ?
S’il s’était concentré sur le travail décisif d’Al-Khwârizmî, Al-Qalsadî et Al-Kâshî, votre livre n’en eût été que plus pertinent.
François Nicolas, compositeur (Paris, Ens-Ircam [23])