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B) Lorsque l'un ou l'autre de ces termes est employé seul, alors :
Il y a alors deux cas : B.a et B.b…
--- B.a) Soit le terme est employé avec la nuance de son sens littéral :
Dans ce cas, ce que désigne le terme "islâm" est distinct de ce que désigne le terme "îmân" (humâ mutabâyinân) (comme en A, ci-dessus).
Ce qui entraîne que tout "mu'min" est aussi "muslim", mais que tout "muslim" n'est pas forcément "mu'min" (baynahumâ 'umûm wa khussûs mutlaqan).
En effet, parfois, même employés seuls (donc hors cas A), les termes "islâm" et "îmân" gardent ainsi une trace de leur sens littéral : la "îmân" est ce qui se trouve dans le cœur, tandis que "islâm" fait référence à l'extérieur uniquement.
Etant donné qu'on ne peut témoigner, à propos d'un homme, que de ce qu'il dit et fait apparemment, et non de ce qui se trouve dans son cœur, on peut donc témoigner que quelqu'un est "muslim", mais non pas du fait qu'il est "mu'min". Le terme "mu'min" désigne donc celui qui croit parfaitement en son cœur. Mais le terme "muslim", lui, n'est plus considéré que dans sa littéralité – celui qui, dans le regard des hommes, est entré en islam – et non plus son sens complet – celui qui est véritablement en islam, corps et cœur (sens que l'on va voir plus bas en B.b).
C'est une fois cette nuance assimilée que l'on pourra comprendre le propos suivant.
Le Prophète (sur lui soit la paix) privilégiait certaines personnes dans le partage de certaines recettes [d'après une interprétation, il s'agissait du khums, et il y a la possibilité de partager celui-ci en fonction de la maslaha]. Sa'd ibn Abî Waqqâs, qui était présent, ne comprit pas que le Prophète donnait en réalité à ceux qui étaient encore faibles dans leur foi, afin de gagner davantage leur cœur, et crut que tous les musulmans y avaient droit.
Ayant remarqué que le Prophète n'avait rien donné à Ju'ayl, un musulman des premiers temps, il lui demanda pourquoi il ne lui donnait rien, argumentant : "Je pense bien qu'il est mu'min". Le Prophète lui dit : "Ne dis pas "mu'min", mais plutôt : "muslim"".
Le même propos se répéta plusieurs fois entre Sa'd et le Prophète. Puis ce dernier lui dit : "Sa'd, je donne à des personnes alors que ce sont d'autres qui me sont plus chères, de crainte que les premières tombent dans la géhenne" (Fat'h ul-bârî 1/109).
Ce qui nous intéresse ici est ce propos du Prophète : "Ne dis pas "mu'min", mais plutôt : "muslim"" : on note que Sa'd n'avait pas utilisé les deux termes "mu'min" et "muslim" côte à côte (comme dans le hadîth que nous avons vu en A, plus haut) : il n'avait employé que le mot "mu'min" ; malgré tout le Prophète lui dit de ne pas utiliser le terme "mu'min" mais de lui préférer le terme "muslim". Le premier est donc général, le second plus particulier : toute personne véritablement "mu'min" est aussi qualifiée de "muslim", tandis que certains "muslims" ne sont pas qualifiés de "mu'mins", puisque soit ils ne croient pas du tout dans leur cœur, soit leur foi n'est pas complète dans leur cœur (nous allons le voir ci-après).