« Aujourd'hui, la liberté accordée aux esclaves, écrit M. de Vaujany, directeur de l'école
des langues du Caire, leur permet de vivre à leur guise sans être inquiétés ; cependant très peu
profitent de ce privilège ; ils préfèrent leur état de servitude exempte de toute oppression, à
l'insécurité d'une situation qui souvent ne serait pour eux qu'une source de peines et
d'embarras. Loin d'être malheureuse, la condition des esclaves en Égypte les élève presque toujours au-dessus de celle d'où ils ont été tirés. Beaucoup d'entre eux, les blancs principalement, sont arrivés aux postes les plus éminents. Un enfant né d'une esclave est l'égal d'un enfant légitime,et s'il est l'aîné de la famille, il a droit à toutes les prérogatives attachées à son rang. Cette fameuse milice des mamelouks, qui a si longtemps gouverné l'Égypte, ne se recrutait queparmi les esclaves. Ali bey, Ibrahim bey, le farouche Mourad bey, défait à la bataille des Pyramides, avaient été achetés dans les bazars. Aujourd'hui encore, il n'est pas rare de
rencontrer un officier supérieur ou un fonctionnaire de haut rang, qui a été esclave dans sa
jeunesse, on en voit même, devenus fils adoptifs, ayant reçu une éducation soignée, épouser la fille de leur maître. »