Il faut connaître le contexte socio-anthropologique. A l'époque, les Arabes vivaient sur un mode de tradition orale, il n'avaient pas de véritable alphabet, mais un proto-alphabet ou un proto-abjad, un genre de syllabaire archaïque, qui servait d'aide mémoire car seulement 13 caractères orthographiés de 3 différentes manières selon la position en début, en milieu ou en fin de mot existaient... Sur une échelle plus étendue encore, à l'époque les scribes étaient très rares, et les supports véritablement très précieux. En sorte qu'un même parchemin servait et reservait parfois plusieurs fois... Dans une telle conjoncture socio-culturelle, un écrit est très facilement assimilable à une nuskhah ou un parchemin quelconque.
De même le terme kitab signifie dans un tel contexte culturel comme une réglementation sans nécessiter d'idée de support écrit. Le contexte historique est donc crucial pour comprendre le rapport diachronique de la dérive sémantique, il n'est pas toujours si aisé d'identifier comment le sens d'un terme s'est stabilisé autours d'une signification particulière dans un milieu donné à une époque précise. C'est tout le travail de la linguistique et de l'historien que de le recontextualiser... As-tu par exemple réfléchi à ce verset de Jérémie : "Comment pouvez-vous dire: "Nous sommes des sages ! Nous sommes en possession de la doctrine de l'Eternel!" Oui, mais le burin mensonger des scribes en a fait un mensonge !" (Jr. 8,10)
En effet, l'écriture du temps de Jérémie devait être un genre de proto-cannanéen gravé dans de l'argile... Alors que la Thora était transmise oralement depuis des siècles.