Tariq Ramadan : les arguments de ses avocats pour demander sa remise en liberté
DOCUMENT RTL - Les avocats de l'islamologue Tariq Ramadan, suspecté de viols, ont déposé mardi 24 avril une deuxième demande de mise en liberté de leur client.
La défense de Tariq Ramadan a déposé pour la deuxième fois, mardi 24 avril, une demande de mise en liberté auprès des juges d'instruction parisiens, d'après les informations de RTL. L'islamologue suisse est mis en examen pour viol et viol sur personne vulnérable suite aux plaintes de deux femmes, Henda Ayari et "Christelle", un prénom d'emprunt. Une troisième plainte a été déposée début mars à Paris par une autre femme, "Marie", mais n’a pas encore donné lieu à un interrogatoire.
Dans sa demande de mise en liberté de 19 pages, que RTL a pu consulter, la défense de Tariq Ramadan, conduite par l'avocat Emmanuel Marsigny, met en cause la cohérence et la crédibilité des plaignantes, ce qu'elle avait en partie déjà fait en février. Elle juge que les dépositions sont en parties "remises en cause par les éléments objectifs du dossier".
Pour tenter de convaincre les juges, le mémoire transmis par la défense s’appuie cette fois-ci sur de nouveaux éléments récemment entrés au dossier, notamment les résultats d’investigations et de vérifications menées à la demande de Tariq Ramadan.
Les prétendus mensonges de "Christelle"
Évoquant la deuxième plaignante, "Christelle", le texte affirme qu’elle "a menti" a plusieurs reprises lors de ses dépositions. Les avocats de l’islamologue s'emploient en fait à dénicher la moindre incohérence et avancent plusieurs éléments factuels à l’appui de leur démonstration.
Selon le mémoire, la plaignante avait fait notamment fait état, dans ses souvenirs, d’une "dispute" dans la chambre mitoyenne de celle ou aurait eut lieu le viol, en octobre 2009 dans un hôtel de Lyon. Or l’enquête a établi que les chambres voisines n’étaient pas occupées ce soir-là.
Autre élément : Christelle affirme qu’après la fuite de sa chambre, au petit matin, elle est a pris un bus près de l’hôtel, en béquille (elle était alors handicapée d’une jambe selon elle) talon cassé, robe déchirée, et le visage tuméfiée et sa béquille. Or les six chauffeurs en service ce matin-là, interrogés par les enquêteurs, n’ont gardé aucun souvenir d’une scène "dont on peut penser qu’elle aurait pu laisser des souvenir", écrit la défense.
Interrogations sur des conversations Skype
Les avocats de Tariq Ramadan n’hésitent pas non plus à contester une photo versée au dossier par Christelle, prise selon elle le lendemain des faits, et montrant son visage "tuméfié". La photo ne montre "aucune violence"affirme le mémoire et "curieusement" elle n’est pas datée, relèvent-ils.
Autre élément mis en avant par la défense : une longue série de conversations sur Skype entre Christelle et une ancienne maîtresse de Tariq Ramadan, entre le 13 et 20 octobre 2009, une semaine après le viol. La plaignante, traumatisée par sa nuit avec l’islamologue, a alors ouvert un blog sous pseudo dans l’idée de dénoncer son comportement avec les femmes.
Selon le mémoire, ces conversations démontrent un "état d’esprit totalement différent" de celui qui apparaît en procédure. Si Christelle dénonce la relation sexuelle forcée et violente que lui a imposé Tariq Ramadan, mais elle disserte également sur son "charme" et plaisante : "c’est vrai qu’il est beau gosse sinon on se serait pas fait avoir lol". La défense interroge enfin la "crédibilité" de Christelle car elle évoque dans ces conversations de 2009 des pressions exercées par "les politiques et le président" pour qu’elle porte plainte.
Une première demande nettement rejetée
Pour les avocats de Tariq Ramadan le maintien en détention est donc "ni justifié ni proportionné", car la décision ne s’appuie pas sur des éléments objectifs et un "doute raisonnable" est permis. L’état de santé de l’islamologue, qui souffre d’une sclérose en plaque, est une nouvelle fois mis en avant. La défense demande donc la remise en liberté et le placement sous contrôle judiciaire contre le paiement d’une caution de 150.000 euros.
La décision sera rendue dans les prochains jours mais il s'agit déjà de la deuxième demande de remise en liberté déposée par Tariq Ramadan. La première avait été nettement rejetée par la chambre de l’instruction pour trois motifs : le risque de fuite de l’islamologue suisse, le risque de "réitération des faits" de viol au vu des témoignages versés au dossier, et le risque pour les plaignantes, qui ont témoigné à plusieurs reprises de menaces et de pressions quotidiennes à l’encontre depuis qu’elles ont porté plainte contre Tariq Ramadan.