Azul,
Un livre doit toujours avoir du sens pour ceux qui le lisent, et un livre s’adresse toujours à un lectorat proche dans le temps et souvent dans l’espace. Même un livre qui essaie d’anticiper l’avenir ou d’être intemporel, doit impérativement avoir un sens pour la première génération de lecteurs, sinon le livre ne se publie, tombe dans l’oubli, et n’est pas recopié ou réédité parce que les gens de ce temps n’en voient pas l’intérêt.
Donc bien sûr des textes comme la Bible ou le Coran parlent principalement de ce qui obsédait les gens de cette époque et il faut pas s’attendre à ce qu’ils parlent des Olmèques ou des Japonais, ce qui n’aurait rien voulu dire pour les premiers lecteurs. Un bon texte est capable de rejoindre les préoccupations humaines universelles, mais toujours en passant par des problèmes qui se posaient à son époque. Et donc Sénèque, par exemple, vieillit très bien, parce qu’il rejoint la psychologie humaine et la morale humaine universelle au-delà des nobles romains du premier siècle pour qui il écrivait.
Ou même imaginer qu’un texte sacré parle de la physique relativiste. Il faudrait que le texte utilise une pédagogie laborieuse, qu’il définisse des concepts physiques, des unités de mesure, qu’il donne un cadre général de science, qu’il commence par introduire des concepts de mathématique, les lois du mouvement de Galilée et Newton, puis qu’il parle de la lumière, de la mesure du temps, des référentiels, avant même d’entrer dans le vif du sujet, et tout ça en utilisant un vocabulaire saisissable par des pasteurs, des paysans ou des caravaniers! Et en plus, ces notions de physique relativiste sont contre-intuitives, infiniment plus que les légendes, les mythes, les récits de miracles, d’interventions divines, dont le cerveau humain est friand.